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Zoom sur le village de Thiron-Gardais

Jouissant d’une belle côte de popularité depuis qu’il héberge un prestigieux donateur, le village de Thiron-Gardais est le nouvel étendard tendance du patrimoine en Eure-et-Loir.

Oyez, oyez, braves gens ! Approchez et traversez la Thironne : aux portes du Perche, à mi-chemin entre Nogent- le-Rotrou et Illiers-Combray, se dresse un vestige bien vivant de notre passé. Du religieux Moyen-Âge au collège militaire du XVIIIe siècle, c’est tout un pan de notre histoire que le village de Thiron-Gardais raconte. Tout débute en 1114, avec la fondation de l’abbaye de la Sainte-Trinité par le très austère Saint Bernard de Ponthieu. Se voulant indépendant de l’ordre de Cluny, l’homme renonce à sa position d’anachorète pour s’établir à Thiron et y édifie un monastère. Le rayonnement de cette future abbaye-mère sera exceptionnel : il s’étendra sur le quart nord-ouest de la France, et bien au-delà de la Manche ; des lieux de culte écossais et gallois lui seront affiliés.

Au total, plus de cent vingt établissements chrétiens s’affirment dépendants de son autorité. Un bel exploit qui n’émouvra guère l’Église : celle-ci mettra un temps record à reconnaitre les mérites du moine puisqu’il ne sera canonisé qu’au bout de… 744 ans ! Entre-temps, l’activité du sieur de Ponthieu dépassera largement le cadre spirituel.
Lui et ses moines développeront le bourg en défrichant le secteur, créant plusieurs étangs et mettant en culture les terres environnantes. À la mort de son initiateur, l’extrême rigueur de l’Ordre diminue fondamentalement mais maintient son joug durant près de sept siècles. En 1629, l’indépendance est perdue aux profits d’un rattachement aux bénédictins.

Dans le même temps, Henry de Bourbon-Verneuil (fils d’Henry IV) fait installer aux abords de l’abbaye un collège militaire dans un souci d’éducation et de discipline pour les nobles désargentés de la région. Cent cinquante ans plus tard, un certain Napoléon Bonaparte est même accepté dans l’établissement… Mais son père renoncera finalement à l’envoyer dans ce territoire que l’on ne nomme pas encore Eure-et-Loir, choisissant le prestigieux collège de Brienne en Champagne.

La fin du XVIIIe siècle aura raison de l’abbaye. Un incendie détruit la majeure partie du monastère en 1786 ; cinq ans plus tard, la Révolution Française est passée par là et l’établissement ferme définitivement ses portes. Le collège suivra le mouvement deux ans après. Laissés à l’abandon, les lieux périclitent ; le chœur de l’abbaye notamment, qui chute au début du XIXe siècle. Il ne reste aujourd’hui que l’abbatiale et une grange aux dîmes qui, comme son nom l’indique, servait à collecter l’impôt en faveur de l’Église. La fin de millénaire verra l’endroit retomber dans un triste anonymat. On notera toutefois l’ajout de « Gardais » (du nom du village mitoyen) à la commune ; une modification récente, puisque datant de trente-cinq ans à peine. La renaissance de ces lieux, qui sont le cœur véritable de ce village d’un petit millier d’habitants, s’est déroulée il y a un peu moins de dix ans. Le bourg fut remis en lumière suite à l’intérêt d’un journaliste passionné d’histoire : Stéphane Bern. L’animateur de Secrets d’histoire et d’Historiquement vôtre visite les lieux en fin d’année 2012 et tombe sous le charme.

Tellement, qu’il se propose de racheter les lieux (ce qui sera fait dès l’année suivante) et d’en faire un musée accessible à tous. Sont alors restaurés sous la direction de l’architecte du patrimoine Guillaume Trouvé, l’ensemble des bâtiments relatifs au collège. Idem pour les jardins qui, en conservant bon nombre de leurs attributs d’autrefois (dont les charniers délimitant un labyrinthe dans les sous-bois), retrouve l’esprit du XIX siècle.

En 2016, les lieux fêtent leur réouverture au public ; c’est un succès. Et l’illustre propriétaire, ne trouvant plus la capitale à son goût, de s’installer définitivement dans
sa récente acquisition, au milieu de notre belle campagne. Aujourd’hui, le domaine de l’abbaye abrite également l’Office de tourisme du Perche Thironnais et le village, fort de ces prestigieuses demeures et de commerces toujours plus nombreux, vit une seconde jeunesse bien méritée.

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