Depuis 135 ans, la Société Coopérative Agricole d’Eure-et-Loir grave son image dans notre département. Si son histoire est un reflet de notre patrimoine, la SCAEL a néanmoins le regard tourné vers l’avenir. La vieille dame se dépoussière, se dynamise, se diversifie pour contribuer au développement du territoire. Elle veille à accompagner l’agriculture d’aujourd’hui et anticiper celle de demain. Rencontre avec Jean-Sébastien Loyer, Directeur Général, pour un tour d’horizon.
Au 15 place des Halles à Chartres, l’histoire de la SCAEL est encore présente. Vous pouvez lire au-dessus des trois arcades : « SYNDICAT AGRICOLE ». Créé en 1886 dans le but de développer l’agronomie chez les agriculteurs par des conseils visant à améliorer la productivité, il regroupait à l’époque crédit, mutualité et syndicat, les trois socles de l’agriculture moderne. Intensifiée et industrialisée pendant les Trente Glorieuses, elle est désormais aidée par une technologie insoupçonnée qui dessine l’alimentation de demain.
COLLABORATION ET ACCOMPAGNEMENT
L’agriculteur d’aujourd’hui se remet en question pour faire évoluer son exploitation. Comme toute entreprise, il doit répondre aux attentes sociétales. « L’agriculteur est un patron qui innove » : circuit court, maraîchage, vente en libre-service, nouvelles cultures. Dans cette diversification, le rôle de la SCAEL est de les accompagner pour répondre aux enjeux locaux. Pour exemple, le développement de plusieurs filières : colza GES, farine, huile de fleur de colza et lavandin, avec la distillerie construite récemment à Orgères, destinée au traitement de la production de 500 ha, cultivés par 70 agriculteurs. La volonté de la SCAEL est de répondre à toutes les agricultures, sans les opposer, en accompagnant ses 1800 adhérents, des semences à la vente en passant par la santé du végétal.
MAILLAGE TERRITORIAL :
L’esprit SCAEL se veut fidèle à l’Eure-et- Loir et aux départements limitrophes. Un champ d’action défini, solide et réaliste dont la croissance se fait par une diversification faite de vraies valeurs au service de l’Agriculture. Un maillage qui se retrouve dans le patrimoine visuel et architectural, par les nombreux silos présents dans le département, dont certains sont les seuls liens économiques dans de petites communes.
OUVERTURE ET ESPRIT D’ÉQUIPE
Premier exportateur de blé tendre en 2021, la SCAEL d’aujourd’hui, avec ses 400 salariés et ses 70 sites, place l’humain au cœur du métier. Grâce à une diversité des profils, loin des préjugés d’un personnel issu uniquement du monde agricole, les idées se bousculent, l’œil neuf croise la parole de l’expérience.
En écho à cette Agriculture 2.0, la SCAEL s’organise désormais autour de 5 pôles d’activité :
Pôle agricole : Regroupant l’activité Coopérative de collecte de céréales. (1 million de tonnes /an)
Pôle Négoce Export : Via sa filiale Lecureur, opérateur majeur de l’exportation de céréales, la SCAEL joue un rôle important sur l’échiquier national.
Pôle Laboratoires : Avec 2 laboratoires microbiologiques, la SCAEL veille entre autres sur votre assiette. En effet, de nombreux restaurants Chartrains et Euréliens font appel au service de Microsept pour la surveillance de l’hygiène de leur cuisine.
Pôle Innovation et Développement : Lancée en 2016, la jeune start up Comparateur Agricole offre aux agriculteurs la vente des céréales et l’approvisionnements des intrants en ligne et continue son aventure avec la SCAEL, actionnaire majoritaire depuis 2020.
Pôle Distribution Grand Public : 11 magasins Gamm vert en Eure-et-Loir.
1 plate-forme de ventes de produits locaux, entre producteurs et professionnels : Sur le Champ.
« Rien ne se refuse, tout s’étudie » insiste J.S. Loyer. » Il est indispensable que les collaborateurs s’épanouissent en
Jean-Sébastien LOYER
leur laissant la capacité de s’exprimer. Une liberté d’écoute et d’action dans un cadre défini, qui privilégie le partage et le travail d’équipe. Si les vues et les opinions sont différentes, le but est commun : l’entreprise. »
PRODUIRE… POUR NOURRIR AVANT TOUT
« Tout le monde doit pouvoir accéder à une alimentation saine, de qualité, et abordable financièrement »
Jean-Sébastien LOYER
C’est un fait. L’exode rural a créé une scission. Depuis la deuxième génération de citadins, le monde agricole se
trouve bien isolé et victime d’une méconnaissance nuisible, due à un manque de questionnement d’une société de consommation pour qui l’alimentation est un dû sans péril.
« Depuis l’ère Chirac, nos politiques ont délaissé l’agriculture. Avant, il y avait toujours une délégation agricole dans les déplacements internationaux »
Jean-Sébastien LOYER
Pourtant, la France connaît 66 millions d’agriculteurs. Eh oui ! La culture d’une plante sur un balcon, la création d’un micro-potager, ou une venue régulière à la campagne semblent parfois donner des connaissances agronomiques suffisantes pour porter un regard critique sur l’Agriculture. Mais le métier ne s’improvise pas, il nécessite de l’expérience, des risques financiers, du travail et avant toute chose, du bon sens paysan !
On oublie également que l’agriculture a aussi un enjeu d’entretien du territoire. Imaginez que les surfaces agricoles du département ne soient pas exploitées.
À quoi ressembleraient les plaines de Beauce ?
SCAEL 2025, L’AVENIR EST DANS LE CHAMP :
La SCAEL, par son maillage, sa diversification et sa collaboration redéveloppe les liens entre producteurs et consommateurs. « L’Agriculture doit revenir dans le quotidien des citoyens ». Une volonté exprimée à travers le programme SCAEL 2025 et ses trois valeurs : Engagement, Audace, et Proximité, avec notamment un développement de la digitalisation et de la RSE.
LE BLÉ, UN ENJEU GÉOPOLITIQUE.
Dans une géographie agricole inégale, Agriculture et Géopolitique sont deux maitres mots que l’histoire conjugue en permanence. Avec 750 Millions de tonnes produites par an, le blé tendre est la première protéine consommée dans le monde (alimentation humaine et animale). Un volume qui correspond à la consommation, ce qui signifie un stock de réserve quasi- inexistant. À l’horizon 2050 avec une projection de 10 milliards d’habitants, les interrogations se posent, la production s’est toujours équilibrée avec les besoins…
Mais les limites sont peut-être déjà atteintes.
« Plus de 50% du blé d’Eure-et-Loir est exporté »
Les échanges mondiaux sont quant à eux de 190 Millions
de tonnes. Sans eux, certains pays seraient en insuffisance alimentaire. Le blé a démontré ses enjeux géopolitiques dans les échanges commerciaux entre la France et les pays du Maghreb. À l’origine du Printemps Arabe en 2011, la hausse des denrées a mis en évidence l’importance de la suffisance alimentaire dans la paix sociale et plus récemment dans les flux migratoires.
En rappel et pour conclure : « Dans la crise mondiale que nous subissons et contrairement à de nombreuses autres matières en rupture, le consommateur français trouve toujours de la nourriture…sans délai ! »
Jean-Sébastien LOYER
En tant qu’acteur du territoire, quel rôle préfères-tu endosser ?
Celui d’aller dans les restaurants locaux
L’avenir est-il dans le bio ?
L’avenir est dans toutes les agricultures.
Paysan ou Exploitant ?
Exploitant
Plutôt péché d’Envie ou d’Orgueil ?
Un orgueil bien placé, caractérisé par l’estime de soi.
Epicurien ou Hédoniste ?
Je privilégie la qualité à la quantité, je suis un hédoniste modéré.
Terrien ou Eurélien ?
Chartrain ! J’ai toujours eu envie d’habiter cette ville.
